SOMNIEM
Nous rêvons
Vous rêvez
Oui, bien sûr, nous rêvons constamment, toujours.
Vous espérez trop avoir
Oui, bien sûr, nous avons appris à attendre et nous espérons tout avoir.
Vous en voulez trop
Oui, bien sûr, nous en voulons trop, et plus encore, tout.
Vous êtes trop pressés
Oui, oui, bien sûr que oui, marcher, arriver, recommencer.
Vous rêvez
Oui, inévitablement, le rêve d’aujourd’hui comme possibilité du lendemain.
Vous espérez trop avoir
Oui, bien sûr, et nous n’avons pas honte d’être des esclaves de l’espoir.
Vous en voulez trop
Oui, bien sûr, c’est notre droit le plus enragé, et encore plus notre devoir.
Vous exigez
Oui, bien sûr, passionnément ou avec mélancolie.
Et malgré tout
et malgré tout il vaut mieux ainsi,
mieux vaut un peuple qui bouge,
bien que parfois avec précipitation,
bien que parfois trop prudent,
bien que parfois sale, veule, gueux,
bien que parfois sublime,
mieux vaut ainsi, avec toute sa condition humaine, étrange et simple
mieux vaut ainsi, plutôt qu’ un troupeau d’agneaux soumis au calcul des gestionnaires d’intérêts,
par conséquent que personne n’ait honte de dire, que personne n’ait honte de crier,
nous rêvons, oui, constamment, nous rêvons sans limites dans nos rêves, nous rêvons jusq’au bout de l’inimaginé.
Nous rêvons toujours,
et nous nous attendons à tout avoir, nous avons appris l’art d’attendre, cet art d’espérer plongés
dans d’interminables nuits d’impuissance,
nous savons attendre et nous nous attendons à tout avoir, tout.
et nous voulons tout, nous voulons l’impossible pour arriver au possible,
nous voulons le possible pour arriver à l’impossible,
mieux vaut ainsi, vous le savez tous
bien que parfois empressés,
bien que parfois sales, veules, gueux,
mieux vaut ainsi, avec toute notre condition humaine, étrange et simple,
mieux vaut ainsi, plutôt qu’un troupeau d’agneaux soumis au calcul des gestionnaires d’intérêts.
Vous rêvez
Oui, bien sûr, nous rêvons constamment, nous rêvons toujours.
Si vous nous dîtes Vous espérez trop avoir
Vous avez bien raison, nous avons appris à attendre et nous espérons tout avoir.
Si vous nous dîtes Vous en voulez trop
Vous avez bien raison, nous en voulons trop, et plus encore, tout.
Si vous nous dîtes Vous êtes trop pressés
Oui, Oui, bien sûr que oui! marcher, arriver, recommencer, oui, nous sommes pressés.
Lluis Llach. Somniem. 1978-1979
Lluís Llach i Grande, dit Lluís Llach, est un chanteur catalan né le 7 mai 1948 à Gérone en Catalogne (Espagne). Il a fait partie du groupe les Setze Jutges et on le considère comme un des chefs
de file de la Nova Cançó (Nouvelle Chanson catalane). En tant qu'artiste engagé avec sa culture il a été un référent musical, mais aussi intellectuel, pour trois générations. Second fils d'un
médecin de village d'une famille de propriétaire terriens et d'une mère qui avait été éduquée dans les écoles de la bourgeoisie barcelonaise. C'est d'ailleurs sa mère qui initie les deux frères à
la musique sur sa propre guitare. Puis vient le piano. Il compose ses premières mélodies vers ses six ou sept ans, mais pour la première vraie chanson il faut attendre 1965, Que feliç era, mare,
dont il écrit la musique sur des paroles de son frère (sources: wikipédia)